Le Fourgon de la mort
Le jour où on appris ça, soit jeudi dernier, voici ce que j'ai écrit :
« 12 morts dans un accident. Logiquement, ça devrait faire la une de tous les médias, tous les ministres devraient se ruer devant télés, micros et stylos dans la chapelle ardente de Montbeugny. Ah oui mais ce sont des Portugais. Et pire, des ouvriers. »
Ce drame a pratiquement disparu des radars et, à part les ministres des Transports et de l'Intérieur qui ont juste pris le temps de faire rédiger un communiqué par leurs services, rien. Qu'a-t-on appris depuis ? Que le véhicule était non un minibus mais un fourgon tôlé avec juste la porte latérale vitrée. Vous vous voyez rouler des heures et des heures dans une boite de conserve ? Ça m'est arrivé, mais c'était il y a soixante ans et sur trente kilomètres, pour aller en famille souhaiter la bonne année aux grands-parents dans le vieux Renault de Tonton Gaby : notre père n'allait pas emmener sa douzaine sur son cyclomoteur, le seul engin motorisé de la famille alors. On a appris aussi que la transformation en transport de passagers était empirique : des sièges de bric et de broc sans ceintures (ce pourquoi le conducteur, équipé lui, est le seul à avoir survécu alors qu'il était dans la partie la plus massacrée du fourgon).
Quant à cette route, pour l'avoir empruntée de nombreuses fois parmi la foule des camions, c'est l'horreur : pour dépasser, même sur les portions autorisées, il faut un véhicule puissant, pas un utilitaire. Et la partie après Moulins est d'une laideur et d'une monotonie rares. Pour l'éviter, je passais précisément par Montbeugny (en plus, c'est un raccourci).
Dans la mesure où ce véhicule venait de Suisse, sa non-conformité n'est peut-être pas l'affaire de la loi française. Quoi qu'il en soit, on a là un nouvelle preuve que les pauvres n'ont pas les possibilités de tout le monde : pour eux, pas d'avion même low cost, pas de bus normal, juste un futur cercueil.