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Al Ceste un jour sur trois (ou quatre) !
17 février 2016

"François le Petit" par Patrick Rambaud le Grand

 

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Si vous n'avez pas encore lu François le Petit, allez-y ! Rambaud, depuis 2008, a tenu la Chronique du règne de Nicolas 1er. Une somme de six tomes, pastichant Les Chroniques du Royaume tenues par André Ribaud dans les années 60-70 en troisième page du Canard Enchaîné, lui-même pastichant leur maître à tous en beau langage et en férocité : le duc Louis de Rouvroy de Saint-Simon, qui peignit la Cour du Roi-Soleil de façon telle que si ses Mémoires avaient paru de son vivant sa vie eût été abrégée, par cent et plus victimes, de mille coups et davantage des plus ignominieux.

Rambaud avait donc imité ce français à son apogée, délibérément précieux. Ça commençait ainsi : « Sa Majesté avait l’œil encapoté mais vif (...) un nez qui pointait pour tirer vers le bas, le cheveu sombre et ondulant comme des vaguelettes peignées. Même parvenu, Notre Précieux Souverain ne trouva point la paix en lui-même, tant il restait secoué en continu par des nervosités...  ». Et ensuite, les provocations, les incohérences, les bourdes, les outrances, les indécences, les aveuglements et la pantalonnade devant et avecque le moqueur Mouamar le Cruel. Autour lui les obséquiosités, les vanités, les trahisons, les calculs. Des ducs de Bordeaux, de Sablé, de Villepin, un grand petit marquis de Benamou, la baronne d'Ati, M. le Cardinal (on aura reconnu l'homme aux faux-pas de Guéant), M. de La Porte (qui reconnaît ce lourdaud de vestiaires ?) et toute la smala. Entamée dans la jubilation, la série s'acheva dans la douleur tant son héros le débectait ; mais un travail, même torturant, est un travail et Rambaud tint bon jusqu'à la fin brutale du règne d'un roi et sa dame de cœur chassés par le peuple comme des valets laissés sur le carreau, il s'en fallut de peu que les piques ne sortent pour jeter leurs têtes dans le trèfle.

Avait-il besoin de souffler après avoir pataugé dans le marigot de la politique française ? L'usurpateur, confit en mollesse de fromage mou, l'inspirait-il autant qu'un mur de caserne ? Rambaud a attendu deux ans pour se remettre à l'encrier, non, à l'acidier. Et va-z-y papa : « Avant qu'il se figeât sous le nom de François IV, M. de la Corrèze était aisé avec son entourage : rien en lui qui n'allât naturellement à plaire. Vous croisait-il, même si vous ne l'aviez jamais vu qu'en peinture, il s'approchait la main tendue et vous demandait tout de go « comment vas-tu ? » (…) N'aimant personne en vrai, connu pour tel (…) Jamais la moindre humeur en aucun temps ; enjoué, gai, paraissant avec le sel le plus fin, invulnérable aux surprises et aux contretemps... ». On trouvera de nouvelles victimes frottées à l'étrille : le diacre Wauquiez, la marquise de Pompatweet, Mme de Prosciutto-Morizet, Leonarda Reine des Romanichels, Ludovine de la Jachère. Mention spéciale à Buisson l'écoute-aux-portes, tailladé selon son mérite : « L'abbé Buisson était un petit homme effilé, nu de crâne et sans perruque, à mine de fouine, à physionomie d'esprit, qui était en plein ce qu'on appelait un faucon. Tous les vices combattaient en lui à qui serait le maître... ». Et toujours reniements, bourdes, trahisons, mépris fortement tranquilles, manières de va-t-en-guerre, et toujours la cour la cour la cour toujours recommencée, même si moins visible. Et toujours Nicolas-le-Ceci-Cela, dont on sent qu'il inspire davantage le pasticheur que François-le-Flou.

Un petit bémol ? A quelques reprises, la manière de Saint-Simon est loin, Rambaud n'écrit plus que comme Rambaud. Bon, plusieurs s'en contenteraient !

(On peut regretter que, tant pour la chronique de Notre Cher Leader que pour celle de François-le-Guerrier, Rambaud-Ribaud ne se soit pas adjoint les services d'un caricaturiste comme Moisan. Hélas, Cabu n'est plus disponible.)

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